Douance/Souvenirs

Qu’est-ce que je fais-là?


Je me pose toujours cette question pernicieuse et turpide (je sais, cette question n’est ni pernicieuse, ni turpide, mais j’adoooooore cette paire d’adjectifs fourmillants de jaune d’ocre – trouvés, je CROIS, chez Flaubert – et elle vient de me passer par la tête, alors j’ai eu envie de l’écrire) au bout d’un moment.

En maternelle, je regardais mes camarades vagir en me demandant pourquoi ils ne parlaient pas, et j’avais envie de me tailler – ce que je faisais, parfois, lorsque la porte de la salle de classe voisine n’était pas fermée à clef, ou, plus inquiétant, lorsque mes parents trouvaient bon de m’abandonner dans un club de plage premier âge avec des sacs à viande hurleurs et des hochets alors que j’étais fan de dinosaures et de petits livres.  Au primaire, je regardais par la fenêtre en attendant le temps béni du lycée et du moment où j’abandonnerais totalement les math. En Inde, je me demandais si les camarades n’avaient rien de mieux à faire que s’abrutir avec du rap, mais la réponse  était « non », bien entendu. Et ma mère de me forcer à aller à ces fêtes où non seulement je devais faire souffrir mes oreilles, mais encore subir les harcèlements des autres pour DANSER. Bouger ce corps pataud et encombrant mal synchronisé, sur de la musique horripilante – et cordieu que j’en avais, du poil aux pattes, à l’époque, car je rejetais tout ce qui appartenait au domaine de la femme, comme l’épilation, le maquillage, les vêtements courts ou avantageux, les soutien-gorge, etc – au milieu d’un troupeau de jeunes confiants, minces, grands, fins, imbus d’eux-mêmes. Au lycée je pleurais dans les jupes de ma prof principale de dépit face au bricolage qu’on nous faisait passer pour de la littérature. En prépa je me tapais la tête contre les murs, non, je n’y avais pas du tout ma place, voilà qu’on nous redemandait d’apprendre par coeur et de recracher « avec méthode », en faisant passer ça pour le summum de l’intellectualisme. A la fac, c’était encore la même histoire.

Et finalement, c’est toujours la même histoire. Je suis à une soirée, je ne sais pas comment aller parler aux gens; je suis au centre équestre, on me dit bonjour, mais je me sens nimbée d’exil, je prends un café (non, un thé, j’ai horreur de l’odeur du café à trois mètres, et puis j’ai déjà du mal à dormir la nuit, je ne vais pas en plus me rajouter de l’excitation, ça suffit) avec des collègues, elles parlent de situations dans lesquelles je n’aurais pas réagi de la même manière, ou dans lesquelles je n’aurais tout simplement pas pu me retrouver,  et je me rends compte que des choses qui paraissaient être évidentes pour elles ne m’avaient jamais effleurée, et vice-versa. Je suis devant mes élèves, et je me demande pourquoi ils ne réfléchissent pas lorsque je pose une question, pourquoi du b-a-ba leur semble si insurmontable, pourquoi ils n’écoutent rien. Hier, j’ai une classe qui s’est comportée comme un troupeau de bêtes, oui, un troupeau de bêtes, pendant une répétition pour le spectacle de fin d’année. Ils se jetaient les uns sur les autres, hurlaient, se vautraient. Certes, c’était l’après-midi. Certes, il faisait chaud. Mais quand même. Je trouve ça indécent.

Régulièrement, les enfants me font éclater à la figure mes propres différences.  Mais du coup, je ne cesse de me demander ce que je fais à enseigner alors que je ne suis pas comme eux, et que ça me gène. Pourtant, en général, ça se passe bien, mais au moindre problème, je me remets à gamberger Alors la solution pour le futur est évidente: me faire recruter par une école pour enfants précoces. Mais d’abord, il faut acquérir de l’expérience, de l’expérience, de l’expérience!

Qu’est-ce que je fais là? Je vis, je survis, parce que mes parents un jour m’ont déposée dans le monde. Je ne suis pas certaine qu’il faille chercher d’autre réponse, parce qu’on ne nous a pas donné le choix d’exister et de devenir exactement ce que nous aurions peut-être voulu devenir (je trouve qu’il faut être assez déconnecté de la réalité pour penser qu’on fait ce qu’on veut de sa vie, où on le veut).  Depuis quelque temps déjà, j’ai une manie de rêvasser à propos des étoiles et des vies qu’elles abritent, quelque part, sans doute par besoin de compenser solitude et absence de vie spirituelle.

J’ai été envoyée au cathé comme beaucoup d’enfants lorsque j’étais en primaire. C’était très ennuyeux. Je ne sais plus trop ce qu’on y faisait. On lisait de courtes phrases, on coloriait des saints, bref c’était nul. Mais j’allais à la messe avec intérêt, tout en ayant des souvenirs précoces de renégatisme. Je ne sais plus en quelle classe nous étions, mais j’ai un souvenir très clair d’être en train de marcher dans une rue avec ma classe de primaire, en rentrant de je ne sais quelle messe -il y en avait toujours une par an avec l’école. Et puis évidemment la question du « tu y crois, toi? » avait circulé, et je me revois en train de chuchoter à l’oreille de ma voisine que non, je n’y croyais pas. C’était un peu par provocation, un peu par étonnement. J’avais peur de pouvoir me tromper. Je me suis forcée à rentrer dans le droit chemin après, incitant mes parents à aller à la messe le dimanche, sinon j’y allais toute seule, à l’église Saint-Jean-Baptiste du Perreux sur Marne.

J’ai passé ma première communion et ma confirmation, très fière d’inviter ma meilleurs amie à l’événement, et bla bla bla. Deux semaines plus tard, par un beau dimanche, j’étais en train d’écouter le sermon du prêtre qui a sorti une histoire du Seigneur est mon berger, nous sommes ses brebis, et je ne sais plus quoi d’autre, quand un choc électrique foudroyant m’a traversée (et je ne dis pas cela par hasard, c’était vraiment analogue à un coup de foudre, et dans la sensation et dans le changement définitif que ça engendre, ayant vécu la chose deux fois je sais très bien de quoi je parle). Tout s’est écroulé en moi, et toute foi avait disparu. Pour toujours. Certes, je ne peux pas dire que j’étais une fervente catholique, mais à partir de ce jour-là, j’ai SU, avec la même chaleur indicible qu’un croyant SAIT, qu’il n’y a pas de divin dans le monde. C’est très spirituel, en somme. Comment est-ce que cela pourrait être rationnel? On ne peut prouver l’existence de dieu, mais on ne peut l’infirmer irréfutablement non plus.

Et depuis tout ce temps je vis avec cette légèreté en moi, cette certitude qu’aucun dieu ne pèse sur l’atmosphère de mon monde. Heureusement d’ailleurs. J’ai plusieurs fois failli faire de grosses bêtises en prenant littéralement les affirmations du prêtre comme quoi si on y croyait vraiment, dieu nous aiderait à accomplir des miracles. Voulant tester ma foi (plus, en fait, que dieu lui-même), j’ai à plusieurs reprises escaladé là rambarde du balcon dans le but de me jeter dans le vide, au motif que si j’avais vraiment la foi, dieu me ferait voler au lieu de me laisser m’écraser par terre. Heureusement que j’étais quand même sceptique. Je passerai sous silence une intense méditation à huit ans à propos de l’âme des choses, à la fin de laquelle j’ai demandé tout fort à un meuble de ma chambre s’il avait une âme. Pardonnez-moi j’avais huit ans!!

Mais il n’empêche que je me demandais toujours d’où je venais. Et je n’arrive pas à laisser cette question de côté même si je pense qu’au fond, elle est une excroissance de pensée humaine déformée. Nous sommes là, point barre. Il n’y a pas à avoir de sens. Nous sommes des êtres nés d’un amas de cellules de deux sources différentes et nous perpétuons une espèce. C’est pas glorieux mais rien dans l’univers ne semble dire que nous soyons là pour avoir un sens à notre existence, et nous nous perdons dans des raisonnements aussi alambiqués que faussement intellectuels à chercher autre chose. Mieux vaudrait s’attarder sur d’autres questions. Oui mais il semble impossible de nous en empêcher. Et lorsque je suis tombée dans la marmite de la douance et de tous les livres qui l’agrémentent, je n’ai pu m’empêcher de relever que les psychologues spécialistes insistent sur le caractère fortement héréditaire de la chose. Evidemment, dans ma famille, je chercher toujours qui m’a refourgué le satané gène. Vous allez dire que c’est comme les antibiotiques, c’est pas automatique, d’accord. Mais tout-de-même. J’ai établi une liste de ce que j’étais la seule à posséder ou à être dans la famille:

Synesthète

Gauchère (même pas de gauchers contrariés )

Créative

En surpoids (et c’est pas anodin car je suis également la plus sportive)

Hyperesthésique

Dotée d’allergies (sauf mon cousin lorsqu’il était petit, mais il semblerait que ça ait été une conséquence d’un accident de voiture vécu par la maman lorsqu’elle était enceinte. Il a vu un guérisseur à trois ans et c’est parti. Libre à vous de dire que c’est du n’importe quoi) fluctuantes, irrégulières

Dysynchronique (encore qu’il semblerait qu’on appelle cela dysharmonique à présent) – mauvaise coordination des gestes et de la pensée, donc maladroite, sale écriture, frustration au piano que j’ai d’ailleurs abandonné.

Bref je ne vais pas continuer la liste comme ça, ce qui est intéressant c’est que je ne trouve pas de liste à faire de ce que j’ai en commun avec eux. Du coup… qu’est-ce que je fais là? Ils se demandent autant que moi d’où je sors. Et le fait d’être isolée dans ma famille comme en dehors d’elle, hormis sur Facebook, que je remercie de me procurer quelques liens, parfois très forts, avec d’autres perdus (le plus curieux étant que j’ai lié des liens d’amitié avec des personnes que j’ai autrefois côtoyées dans la réalité sans jamais leur adresser la parole), me pousse à chercher une réponse. En l’absence d’explication rationnelle vraiment satisfaisante, j’ai naturellement fait ce que tous les êtres humains depuis la nuit des temps ont fait, j’ai regardé les étoiles.

Il semblerait qu’un nombre écrasant de religions soient fondées sur la venue de dieux sur Terre depuis les étoiles. Les Indiens d’Amérique par exemple parlent de « starpeople », j’ignore comme cela se dit dans leurs langues, mais je trouve le terme anglais très joli. Les peuples des étoiles. Ils venaient, restaient un certain temps, enseignaient des choses aux hommes, repartaient. Cette théorie – qui sous beaucoup d’aspects manque de crédibilité car ses défenseurs sont trop enthousiastes et interprètent tout à la manière de ce prisme- explique le chaînon manquant de l’évolution par la venue de ces peuples sur Terre pour chercher de l’or, dont les propriétés très intéressantes en font un matériau très précieux non pas d’ans l’art, mais dans la création de technologies de pointe. Ne pouvant procéder à la prospection seuls, ils ont génétiquement manipulé ce qu’ils ont trouvé sur place jusqu’à obtenir une espèce capable de miner correctement tout en ayant un minimum de jugeote. Cette théorie s’attaque également à apporter des réponses à des mystères qui nous rient au nez depuis des millénaires: comment les Anciens, ayant à peine évolué par rapport au stade de l’Australopithèque (certaines cités dateraient de dizaines de milliers d’années), ont-ils pu construire des cités énormes, détacher des blocs de pierres de plusieurs dizaines de tonnes d’une falaise, puis les déplacer, les tailler et les assembler afin de constituer des structures incroyables, parfois en hauteur, à l’aide d’outils rudimentaires, de troncs, et de force humaine, avant l’invention de la roue? Je me souviens que déjà, lorsque nous étudiions les Egyptiens au collège, cela m’avait fait tiquer. Des ingénieurs s’emploient à rechercher la manière dont cela a été possible. Il ne suffit pas d’atteler plein d’hommes à un bloc de pierre et de tirer et pousser, quitte à se tuer à la tâche. Cela pose des problèmes pratiques insolvables. D’autre part, dans certaines ruines, les blocs de pierre sur plusieurs étages apparaissent fusionnés entre eux, ce qui n’aurait pas été possible à l’aide d’un simple feu. Certains ornement, certaines découpes, certains angles sont si précis qu’à notre époque, on emploie des technologies au lazer et au diamant pour le faire, et que l’idée même de construire toute une cité par ce moyen apparaît illusoire. Avons-nous été visités par des êtres d’ailleurs dans le passé (nous le serions toujours, d’ailleurs), sommes-nous le produit de leur passage?J’ai également du mal à gober comment des hommes aux moyens aussi rudimentaires aient pu seulement développer un concept aussi élaboré que celui d’une divinité, mais cela n’engage que moi.

De grands scientifiques en sont persuadés, Neil Armstrong a tenté de le dire; on trouverait des descriptions de machines hors du monde dans des textes aussi variés que le Mahabarata (des « vimanas », le livre de bord de Christophe Colomb, des textes de Benjamin Francklin et d’autres Pères Fondateurs de l’Amérique. Pourquoi diable serait-ce absurde? Il me paraît bien plus absurde de penser que c’est impossible tout simplement parce que cela nécessiterait des technologies inouïes, donc inconcevables dans nos petites têtes. Ces gens-là doivent visiter des tonnes de planètes et nous ne leur avons pas échappé. Certaines tribus comme les Dogons en Afrique ont des connaissances des étoiles à travers leurs mythes et légendes qui s’avèrent justes tout en n’ayant pas pu relever d’observations à l’oeil nu.

Parfois, je me dis qu’ils ont peut-être raison, ces rêveurs, que nous avons réellement perdu quelque chose de notre passé. Cela paraît capillotracté aujourd’hui, mais dans cent ans? Qui sait? Les esprits ont été ouverts à la possibilité de tout temps mais aujourd’hui nous y sommes réfractaires au nom d’un scepticisme qui touche à l’absurde. Si vous cherchez bien, sans hostilité, vous vous apercevrez que dans votre entourage il y a des gens qui ont vu des choses qui défient l’entendement et qui n’en parlent pas de peur de passer pour fous. Quelque part dans ma famille il y a une dame qui a vu un vaisseau orange dans les années 50. On n’en parlait pas à l’époque. Une autre personne qui a influencé ma vie m’a confié l’année dernière avoir « vu une soucoupe », du bout des lèvres. Je précise qu’i avait influencé ma vie longtemps avant de me dire cela au détour d’une conversation.

Une chose est sûre, je ne peux pas savoir d’où je viens, mais si des visiteurs d’un autre monde reviennent et se portent à notre connaissance, je serai prête à décamper avec eux à la première occasion. Au moins, je sais où je veux aller!

 

OVNIS au-dessus de Nüremberg au XVIè siècle.

 

 

6 réflexions sur “Qu’est-ce que je fais-là?

  1. Tres bien écrit, comme d’habitude.

    Capillotracté, ce mot m’a amusé !

    Mon Dieu, c’est toute ta vie que tu racontes là Chrodegang ! Héhé.

    Ancient Aliens. J’ai commencé à regarder l’émission sur ta suggestion.

    Toutefois, je crois à Dieu. Moi de même, néanmoins, je n’ai pas cru à Dieu ou à quoi que ce soit de religieux, étant plus jeune. Ce sont des expériences mystiques, dont je crois t’avoir fait part, qui m’ont marqué et ont transformé ma vision de la vie. La lecture de certains livres, aussi (Le Matin des Magiciens, par exemple). Dieu. Je ne sais pas qui Il est. J’ai une vision plutôt scientifique de la chose, si je puis dire. Dieu, c’est peut-être la « conscience » de la planète Terre? Peut-être est-ce la conscience humaine collective*? Une prière, elle, fait peut-être appel à des lois de la physique ou des propriétés du cerveau que nous méconnaissons? Un grand sentiment de spiritualité m’anime, mais beaucoup des idées avec lesquelles je jongle demeurent fort mystérieuses pour moi.

    *http://noosphere.princeton.edu/ Jette un oeil à ça!

  2. En tout cas, je trouve tout cela intéressant et distrayant (à défaut de tenir debout)! N’oublions pas que dans un futur plus ou moins proche il se pourrait que tout ceci ne soit plus de la science-fiction comme ça l’est à présent! Ce sont des théories d’avenir!!

  3. j’adore tes posts mais specialement ceuli là. J’ai rêvé des étoiles comme toi pendant longtemps. Tout le mystère de l’univers, c est peut etre une echapatoire, mais rever fait tellement de bien. Et puis ce n’est pas incompatible avec D.ieu, au contraire, on vient tous du Ciel et pas seulement en tant que poussiere d’etoile.

    • Merci Patrick pour ce message de soutien, je recommencerai à écrire lorsque j’aurai un peu plus de temps, ces temps-ce je croule sous le travail!

Laisser un commentaire